Au Pakistan, la désinformation sape la campagne de vaccination contre le HPV
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Au Pakistan, la désinformation sape la campagne de vaccination contre le HPV.
Islamabad (AFP) - Au Pakistan, où la vaccination suscite une méfiance généralisée, la dernière campagne contre le papillomavirus n'a atteint que la moitié de son objectif, sapée par un flot de désinformation qui a découragé parents et adolescentes.
Dans la très conservatrice société pakistanaise, la dernière campagne anti-HPV, visant les jeunes filles pour prévenir les infections dues aux souches sexuellement transmissibles du papillomavirus humain (HPV), responsable de plus de 90% des cas de cancer du col de l'utérus, a été l'objet de nombreuses rumeurs infondées.
A Karachi, la grande ville du sud, Maryam Bibi, 30 ans, a refusé de faire vacciner ses trois filles.
"Mon mari me l'a interdit, car on entend que ce vaccin va les rendre stériles et sert à contrôler la population", dit-elle à l'AFP, relayant une légende urbaine tenace selon laquelle les vaccins seraient un complot occidental pour réduire les populations musulmanes.
De son côté, Humna Saleem n'en voit pas l'utilité : "le cancer du col de l'utérus est terrible mais pourquoi ne pas dire à nos garçons d'être fidèles plutôt que de dire à nos filles de se faire vacciner ?", interroge cette mère de 42 ans qui habite à Lahore, grande ville frontalière de l'Inde.
Car beaucoup sont persuadés que seul un grand nombre de partenaires sexuels induit des infections sexuellement transmissibles, dans un pays où les relations hors mariage sont illégales. D'autres soutiennent que l'injection entraîne un dysfonctionnement hormonal et augmente la libido des vaccinées.
Lors de cette campagne deux semaines qui s'est achevée samedi, les autorités espéraient vacciner 11 millions de Pakistanaises de 9 à 14 ans. Mais seulement six millions de doses ont été injectées, rapporte un responsable du ministère de la Santé sous le couvert de l'anonymat.
Au Pakistan, la confiance dans les vaccins a été ébranlée par une fausse campagne de vaccination par la CIA pour localiser le chef d'Al-Qaïda et cerveau du 11-Septembre Oussama ben Laden, tué en 2011 dans le nord du pays.
Inlassablement, les vaccinateurs tentent de répondre aux fausses informations, faisant du porte à porte ou ciblant les établissements scolaires, notamment pour le vaccin anti-HPV qui s'adresse principalement aux adolescentes.
Au Pakistan, le cancer du col de l'utérus fait des ravages, avec environ 5.000 cas diagnostiques chaque année selon l'Unicef, un chiffre probablement sous-évalué. Les deux tiers des femmes atteintes succombent à la maladie.
"Le premier jour, nous avons atteint 29% de notre objectif, un chiffre décevant mais passable", raconte Syeda Rashida Batool, responsable locale qui a lancé la campagne en vaccinant sa fille.
"Mais le soir même, des vidéos ont circulé en ligne et ce chiffre a chuté", regrette-t-elle.
Les images virales montrent par exemple des jeunes écolières pliées en deux de douleur, les internautes assurant qu'elles ont été victimes d'effets secondaires du vaccin.
En réalité, cette vidéo a été décontextualisée, et montre une salle de classe où des gaz lacrymogènes avaient été lancés lors d'une manifestation.
Le vaccin contre le HPV, administré depuis des années dans plus de 150 pays, est jugé fiable par l'Organisation mondiale de la santé, et son efficacité est prouvée scientifiquement pour prévenir le cancer du col de l'utérus.
Alors, pour tenter de taire les rumeurs, le ministre pakistanais de la Santé, Syed Mustafa Kamal, a fait appel aux médias pour filmer la vaccination de sa fille adolescente.
"En 30 ans de carrière, je n'ai jamais rendu ma vie de famille publique, mais ma fille, comme les filles de la nation, me sont chères donc c'était nécessaire", a-t-il assuré.
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Une soignante (g) administre le vaccin contre le virus du papillome humain (VPH) à une adolescente, lors d'une campagne de vaccination contre le cancer du col de l'utérus, le 24 septembre 2025 à Karachi, au Pakistan - Rizwan TABASSUM (AFP)