Au cœur de Marseille, la cocaïne prospère sur la précarité
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Au cœur de Marseille, la cocaïne prospère sur la précarité.
Marseille (AFP) - Sur les trottoirs, sous les porches, dans les parkings, ils sont de plus en plus nombreux, de plus en plus précaires: fumeurs ou "injecteurs" d'une cocaïne omniprésente dans le centre de Marseille, ils errent, dépendants d'associations submergées, entre violence des dealers et ras-le-bol des riverains.
Les ramasseurs de seringues mandatés par la Ville circulent entre les passants, munis de longues pinces et d'un récipient jaune monté sur chariot.
En deux ans, le budget consacré par la mairie à ce nettoyage a été multiplié par six, à 152.000 euros pour 2025, plus que la totalité des subventions (150.000 euros) versées aux associations de réduction des risques.
Une "aberration" pour Antoine Henry, directeur de l'association ASUD Mars Say Yeah, qui portait, jusqu'à son abandon en janvier 2024, le projet marseillais de Halte soins addictions (HSA), qualifiée de "salle de shoot" par ses détracteurs.
"Tout était ficelé, financé, puis il y a eu une reprise en mains par le ministère de l'Intérieur qui a mis son veto en s'appuyant sur l'opposition de quelques riverains et certains politiques", rappelle le directeur d'ASUD.
Lancées il y a 40 ans en pleine épidémie de sida, ces "salles de consommation à moindre risque" sont aujourd'hui une centaine en Europe, mais seulement deux en France, à Paris et Strasbourg, qui arrivent fin décembre au terme d'une phase d'expérimentation.
"On estime aujourd'hui à plus de 2.000 les consommateurs de rue en centre-ville, la plupart sans logement ni revenus, souvent contaminés, sans accès aux droits, voire sans papiers", énumère le directeur d'ASUD, dont "la file active d'usagers a doublé en deux ans".
Une hausse qu'il explique par une "précarisation générale" dans la métropole la plus pauvre de France, mais aussi par la multiplication depuis 2023 de petits points de deal en centre-ville. Des "annexes" des réseaux des cités, fonctionnant H24, "au plus près des consommateurs les plus précaires" qui y achètent la cocaïne dix euros la dose.
"On voit de plus en plus de jeunes, de femmes, témoigne Youcef Mahi, gardien d’immeuble à Belsunce. Je ne porte pas de jugement. On est des spectateurs du désespoir..."
Zohra (prénom modifié), 36 ans, vit entre la rue et la prison. Gravement malade, elle grelotte sous sa parka, en plein soleil. Elle affirme qu’on lui "donne" la cocaïne qu'elle s'injecte, mais ne pas fumer "le crack qui rend fou".
Apeurée, Zohra se cache de tous, de la police, des médecins, des dealers qui se font concurrence à coups de fusillades et de rixes entre la porte d'Aix et la gare Saint-Charles.
Régulièrement, lors des maraudes avec son association Nouvelle Aube, Joachim Levy retrouve Zohra et, inlassablement, tente de la convaincre d'accepter un parcours de soins: "Sinon, tu vas mourir là".
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Sur les trottoirs, sous les porches, dans les parkings, ils sont de plus en plus nombreux, de plus en plus précaires: fumeurs ou "injecteurs" d'une cocaïne omniprésente dans le centre de Marseille - JOEL SAGET (AFP)