13-Novembre : la menace terroriste en pleine mutation
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13-Novembre : la menace terroriste en pleine mutation.
Paris (AFP) - Un commando surentraîné, convoyé de Syrie ou d'Irak pour frapper la France au nom du Jihad : ce scénario des attentats du 13 novembre 2015 est aujourd'hui jugé de moins en moins probable, quoique jamais écarté par les acteurs de l'antiterrorisme.
Si la menace reste très élevée, elle a pris une nouvelle forme, plus autonome vis-à-vis des organisations terroristes islamistes et portée par des auteurs aux profils plus complexes.
- Un risque toujours élevé -
Depuis 2020, la France a été touchée par sept attaques qualifiées de terroristes, dont la dernière au commissariat de Rambouillet (Yvelines) en avril. A celles-ci s'ajoutent, selon les autorités, six projets déjoués sur la même période, dont celui en avril contre une église à Béziers (Hérault).
Le nombre d'inscrits au Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) est passé d'environ 10.000 en 2017 à 7.535 au 1er septembre.
Mais cela ne doit pas être interprété comme un recul du risque. "Désormais, on assume de clôturer les individus sur lesquels les éléments recueillis ne sont pas suffisants pour prioriser les moyens sur les personnes pouvant constituer une réelle menace", décryptait fin juin une source sécuritaire.
Le 15 juillet, Al-Qaïda a diffusé une nouvelle vidéo évoquant les caricatures de Mahomet et appelant à s'en prendre à la France alors que s'est ouvert mercredi et pour huit mois le procès des attaques du 13 novembre 2015.
"C'est une occasion de faire une opération de manière beaucoup plus retentissante à ce moment-là", estimait fin mai auprès de l'AFP le procureur national antiterroriste Jean-François Ricard.
S'y ajoute le délicat suivi des sortants de prison - 120 en 2020, au moins 59 en 2021. "Certains, frustrés de ne pas avoir pu commettre leur acte, peuvent nourrir un sentiment de revanche", alerte la source sécuritaire.
- Une menace qui s'autonomise -
"La menace islamiste n'est jamais là où on l'attend. Quand on commence à comprendre comment elle fonctionne, elle change", résume M. Ricard.
Depuis deux ans, elle est le fait d'assaillants plus "autonomes" dont le lien avec les organisations terroristes - qui ne revendiquent plus systématiquement leurs actions - s'est largement distendu.
"C'est la rencontre d'une atmosphère d'hostilité envers l'Etat, perçu comme un ennemi de l'islam, et des profils d'individus perméables et réceptifs à ce type de discours", selon la source sécuritaire, en phase avec la notion de "jihadisme d'atmosphère" développée par Gilles Kepel, spécialiste du monde arabe.
En parallèle de ces discours, le "cyberjihad" s'est accru depuis la chute du califat autoproclamé de l'organisation Etat islamique (EI). Il offre une propagande toujours résiliente et accessible en deux clics sur internet.
"Certaines vidéos sont devenues des classiques, des musts, et on n'arrivera jamais à s'en débarrasser", déplore la source sécuritaire.
- Une détection plus difficile -
Depuis l'attaque au colis piégé à Lyon en mai 2019, tous les auteurs d'attentats étaient inconnus des services de renseignement.
Individus tour à tour ultra-religieux, politisés, fascinés par la violence, dépressifs, avec des troubles psychiatriques et, plus récemment, mineurs ou jeunes majeurs en rupture : "au moins six profils différents" se dégagent et parfois se superposent, avec des "motivations extrêmement variables", insiste la source sécuritaire.
Leur "isolement social extrême", leur "mode opératoire simple" - souvent un couteau - sans recherche d'armes ou d'explosifs et leur instabilité personnelle qui les conduit à "basculer" en quelques heures "sans signe précurseur" sont autant d'obstacles à leur détection.
Pour y remédier, une nouvelle loi antiterroriste promulguée fin juillet est venue pérenniser la technique dite de l'algorithme qui permet d'analyser des données de navigation sur internet fournies par les opérateurs télécoms et de l'étendre aux URL de connexion.
"Seule l'interaction physique permet de jauger l'intention du passage à l'acte" et "il se passera longtemps avant que l'algorithme devienne l'alpha et l'oméga des services", tempère la source sécuritaire.
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Des gendarmes armés montent la garde devant le Palais de Justice de Paris, le 8 septembre 2021, où s'ouvre le procès des attaques du 13 novembre 2015 © AFP/Archives Thomas COEX